[acc-cca-l] Nouvel appel, La communication et ses techniques sont-elles morales?, CR 33, AISLF, Tunis, juillet 2021

George, Éric george.eric at uqam.ca
Sat Sep 26 16:13:46 MDT 2020


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La communication et ses techniques sont-elles morales?


Dans cet appel, nous avons mis l’accent sur la nature complexe, contradictoire de la communication et de ses techniques, à la fois remède et poison, et dans ses relations complexes avec la morale. L’épidémie de Covid-19 l’a bien montré : la technologie a aidé à contenir l’épidémie tout en montrant ses limites en matière de protection des données ; elle a permis à des familles endeuillées de se recueillir en ligne tout en renforçant la brutalité de la mort ; elle a atténué des crises économiques et diffusé la culture mais renforcé les inégalités sociales et culturelles. Le développement de l’éducation à distance pendant la période de confinement qu’ont connu nombre de pays en constitue d’ailleurs un exemple puisqu’il a permis de remettre sur le devant de la scène la notion de fracture(s) numérique(s) qui semblait pourtant oubliée. En fait, tous les aspects mentionnés dans l’appel original sont susceptibles d’être abordés à l’aune de la crise sanitaire actuelle. De plus, cette crise révèle combien l’humanité fait face à des enjeux d’une ampleur considérable tels que les changements climatiques et l'effondrement de la biodiversité, ce qui pose la question des relations entre communication, technologies et morale de façon encore plus aiguë.

 Avec la création puis le développement d’un vaste ensemble de technologies médiatiques, la communication a pris une place croissante et recouvert des réalités de plus en plus diverses dans nos sociétés présentant parfois certains paradoxes. Ainsi l’internet constitue-t-il tant un lieu où peuvent s’épanouir les paroles minoritaires et contestatrices qu’un espace où déferlent les propos extrémistes et enflammés. Le réseau favorise la mise en visibilité de la diversité tout en accordant la priorité à une culture blanche, hétéronormative et privilégiée, à la manière de celle que promeut la culture algorithmique. Il offre soi-disant des opportunités d’ascension aux personnes les plus défavorisées, tout en reproduisant les inégalités. Il est dans le même temps outil démocratique et de propagande ; outil qui encourage les libertés tout en contrôlant les individus par le biais de quelques géants industriels et États dominants.

Ainsi, les dispositifs de communication constituent-ils tantôt des techniques de libération, tantôt de subordination ; tantôt des outils qui déplacent les rapports de pouvoir, tantôt des outils qui les produisent et les reproduisent.

 En réalité, la communication, et notamment numérique, contribue à déplacer les normes dans tous les domaines. Elle favorise une certaine perméabilité des classes sociales ; elle bouscule les modes de production des savoirs établis ; elle permet à l’identité de devenir un projet de réalisation individuelle ; elle participe à la transformation des codes de la sexualité ; elle recompose les normes de genre et trouble les frontières entre les monde des vivants et des morts... Elle contribue à fabriquer une société plus flexible en matière de production et de consommation d’œuvres culturelles, d’entretien des relations sociales, de gestion de la vie professionnelle ou familiale, etc.

 Pourtant, dans le même temps, la multiplication des dispositifs sociotechniques et de leurs usages engendre des phénomènes d’accélération sociale généralisée, de promotion du culte de l’urgence ou de tyrannie en termes de performance et de visibilité. Il en ressort un certain nombre de pathologies sur le plan des relations humaines, de la vie professionnelle, du bien-être, de la santé, de la protection de la vie privée, de la vitalité du débat public ou encore de la construction individuelle ou de la fabrique identitaire...

 Dans ce contexte, la communication ne joue-t-elle pas contre la morale ? Les espoirs tant attendus d’une communication salvatrice ne seraient-ils pas en voie d’effondrement ? L’évolution des normes sociales permise par la communication ne se réaliserait-elle pas pour le pire plutôt que le meilleur ? Ou comment pouvons-nous penser le rôle de la communication et de ses techniques à des fins d’édification d’éventuelles nouvelles normativités ? L’instauration d’une pluralité de normes est-elle possible sans céder à un relativisme cynique ? Ces questions apparaissent d’autant plus pertinentes que c’est l’avenir même de notre espèce et de notre vie sur Terre qui constitue dorénavant (ou devrait constituer) l’enjeu majeur qu’il nous faut aborder.

C'est cet ensemble de questions que souhaite aborder le CR 33 dans le cadre de ce congrès de l’AISLF dédié à la « société morale et à ses enjeux normatifs dans les sociétés contemporaines ». Études de terrain ou réflexions théoriques apportant un éclairage sur ces questionnements seront les bienvenues.

Pour proposer une communication : XXIe congrès de l'AISLF :: Tunis - 6-10 juillet 2020<https://congres2021.aislf.org/pages/34-aac.php>
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